« LES INTELLO,

ILS NOUS PRENNENT LA TÊTE ! »

 

 

          Oui, c’est vrai ça. Et puis nous, nous ne voulons pas que quelqu’un nous prenne la tête. Non mais c’est à nous cette chose la !

          Et puis, d’abord, c’est qui ceux la : les intello ? Hein ? Je vous demande.

          Bon, on peut supposer que « intello » c’est un abrégé de intellectuels. Alors, « intellectuel » ça veut dire quoi ?

          Demandons à quelqu’un de neutre : l’encyclopédie hachette multimédia de l’ordinateur par exemple.

          intellectuel, uelle adj.

          1. Relatif à l'intelligence, à l'activité de l'esprit. Activité intellectuelle. Facultés intellectuelles.

          2. Qui exerce une activité faisant surtout appel à l'esprit, à l'intelligence. Travailleur intellectuel (par opp. à travailleur manuel). Subst. Les intellectuels.

          3. Qui s'intéresse surtout (parfois exagérément) aux activités de l'esprit. Subst. C'est un pur intellectuel.

          Ah bon.

          Donc, on peut considérer que les intello, ce sont des gens qui ont l’habitude d’utiliser leur intelligence. Ce qui laisse à penser qu’ils en sont, un peu, pourvus et qu’ayant l’habitude de s’en servir, ils y sont entraînés.

         D’autre part, qui a tendance à ce plaindre de l’activité mentale des intellectuels ? Les autres, je présume. Donc ceux qui ne sont pas habitués à se servir de leur intellect.

          Tiens, ça me rappelle une anecdote que j’ai vécue il y a pas mal d’années. Je vais vous la raconter.

          Cela se passait dans un village de montagne où j’habitais. Ce village, avait perdu une partie de sa population. Il restait quelques habitants en partie liés à l’agriculture ancestrale ou salariés et vivotant comme ils pouvaient. Mais il y avait aussi de nouveaux habitants qui, fuyant la ville s’y étaient installés. Ces derniers, ne serait-ce que pour pouvoir acheter une maison ou un terrain à bâtir, avaient des revenus un peu plus conséquents et surtout un niveau socioculturel un peu plus élevé.

          Arrivent les élections municipales. Les nouveaux, dans le souci de s’insérer davantage dans la vie locale, avaient espéré être contactés pour la constitution des listes électorales. Que non ! Il ne fallait pas mélanger les torchons avec les serviettes. Donc, voilà que les nouveaux s’organisant pour concocter une liste. Et voilà les anciens inquiets. Un jour, en revenant de travailler, je passais devant un mur de soutènement au bord de la route et des esprits forts avaient écrit dessus à la peinture : « Au secours les intelligents veulent tout diriger à Saint … Machin ». Alors là, je n’ai pas pu me retenir. Je suis rentré chez moi, j’ai pris un pot de peinture, je suis redescendu jusqu’au mur et j’ai ajouté : « C’est tellement mieux quand c’est les imbéciles ».

          Je suis, sans doute, benêt, mais j’aurais tendance à écouter plus les gens instruits que les autres. Je n’arrive pas à comprendre comment des gens clamant leur médiocrité supposent être plus pertinents que d’autres qui sont plus instruits sur le sujet.

          Ce doit être mon côté « ringard ».

          Il est clair qu’il y a eu des époques où des gens fort intelligents n’avaient pas la chance d’aller à l’école. On pouvait être ouvrier agricole et fort intelligent. Mais de nos jours ? Tout le monde va à l’école.

          Alors ?

          Il faut quand même se souvenir que les gens ne sont pas égaux devant la vie. Il y a les grands gaillards et les petits malingres. Il y a les solides et les maladifs. Il y a aussi les malins et les moins malins.

          S’agissant des grands costauds et des vigoureux, ça ne se discute pas. Ça se voit. Pour ce qui est des différences intellectuelles, c’est plus compliqué. Comme ce n’est pas repérable physiquement, on peut le nier. Pourtant, lorsqu’au début du vingtième siècle, l’école élémentaire étant devenue obligatoire, on a constaté que certains ne parvenaient à apprendre à lire, on s’est interrogé et Binet (Alfred, 1857-1911) a constaté qu’effectivement, les individus présentaient des différences dans leurs capacité à réfléchir au même titre que dans leurs capacités à porter des choses lourdes ou à courir vite ou à résister plus longtemps à la fatigue.

          Il en ressort qu’il ne faut pas dénigrer ces personnes. C’est un fait biologique contre lequel elles ne peuvent rien.

          Egalement, comme il s’agit d’un phénomène touchant le vivant, on peut faire une répartition statistique des plus ou moins grandes capacités des individus dans le domaine. On obtient alors une courbe dite de Gauss (Carl Friedrich, 1777-1855) dans laquelle on constate que le plus grand nombre se trouve autour de la moyenne tandis que cela va en diminuant lorsqu’on s’éloigne vers la gauche de la courbe (les plus faibles) ou vers la droite (les plus forts). Soixante pour cent des individus sont regroupés autour de la moyenne (plus ou moins un écart type).

          Il s’en suit que ceux qui sont hors de ce groupe ne sont que quarante pour cent et ceux qui sont du côté des plus « malins », c'est-à-dire hors de l’écart type à droite ne sont donc que la moitié de ces quarante pour cent (la courbe étant symétrique soit vingt pour cent.

          Embêtant, ça.

          Parce que les soixante pour cent de la moyenne vont avoir du mal à accepter que les vingt pour cent plus rusés qu’eux réfléchissent à leur place.

          Toutefois, en bonne démocratie, ils sont majoritaires.

          Alors, ils décident que tout cela n’existe pas et n’a pas de valeur. Dès lors, à quoi bon s’instruire puisque ça n’a pas de valeur ? Et puis, s’instruire, réfléchir, c’est fatigant. Cela donne mal à la tête. Cela « prend » la tête.

          On édicte une religion qui dit qu’il ne faut pas « se laisser prendre la tête » par les problèmes. On agira au ressenti. C’est tellement mieux. Si un intello (un des vingt pour cent) vient vous faire remarquer que vous vous y prenez mal ou que vous réfléchissez de travers, ce n’est pas compliqué vous lui lancez au visage qu’il vous prend la tête. Prendre la tête, tabou.

          Ceux qui constatent et qui analysent les dysfonctionnements des choses se voient imposer le silence par ceux qui ne veulent pas qu’on réfléchisse. Ceux qui ne réfléchissent pas ne veulent pas qu’on leur prenne la tête.

          C’est le triomphe de la médiocrité.

          Quelque fois, on entend : « Les intello, on les emmerde ». Comme je suis mal embouché et un peu irascible, si je me laissais aller, j’aurais tendance à répondre « Et si vous saviez à quel point c’est réciproque » mais je m’abstiens. Dans le fond, ce serait stupide. Ils sont plutôt à plaindre. C’est juste attristant.

          Les intello, ils nous prennent la tête. Ça va pas non ?

          Si les intello voulaient prendre la tête de quelqu’un, ce serait, à la rigueur celle de Platon, de Pythagore, de Montaigne, de Descartes, de Lavoisier, de Nietzsche, de Planck ou de Einstein ; mais la leur, avec le vent qui la traverse, d’une oreille à l’autre, en agitant mollement les toiles d’araignées qui y flottent, elle est presque vide et le peu qui y demeure refuse de travailler.

 

 

Les intello, franchement, de cette tête,

qu’est-ce que vous voulez

 qu’ils en fassent ?

 

Commentaires: 3
  • #3

    Puits Fabienne (samedi, 24 août 2019 01:30)

    Pas de danger que l'on prenne la mienne de tête ! Juste assez cultivée pour sourire de vos élucubrations !!!

  • #2

    Mustapha Hasnaoui (dimanche, 06 mars 2016 09:53)

    C'est évident que la populace n'aime pas les intellectuels. Ce sont les éboueurs de la crasse humaine.
    Nous les savons plus que nécessaires, mais les rencontrer et les voir travailler, crée aussitôt un malaise chez les producteurs de poubelles que nous sommes.

  • #1

    serai pas là (dimanche, 06 mars 2016 08:13)

    entre nous, si y avai des lumière et des intellectuel , des philosophe et des ecrivains dans ce pays, on en
    serai pas là

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